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jeudi 18 décembre 2008

Astana bientôt dans la mêlée afghane

Plaire aux Occidentaux et acquérir une légitimité internationale, telles sont les motivations du président Nazarbaev pour s’engager en Afghanistan. Même si, pour l’instant, on ne parle que de maintien de la paix.

DE LONDRES
Le Kazakhstan envisage sé­rieusement d’envoyer des unités de maintien de la paix en Afghanistan. Ce serait le premier déploiement de soldats d’Asie centrale depuis la guerre soviéto-afghane [1979-1989]. Le Kazakhstan se propose de prendre cette mesure controversée après avoir décidé, en octobre dernier, de retirer ses troupes d’Irak, où elles étaient basées depuis 2003 sous commandement polonais. Les militaires kazakhs effectuaient des missions de déminage et de purification de l’eau. Le ministre des Affaires étrangères, Kanat Saoudabaev, a en effet clairement laissé entendre que son pays envisageait de déployer des forces en Afghanistan pour soutenir la Force internationale de sécurité et d’assistance (ISAF). Le 20 novembre, à l’occasion d’une session plénière de l’assemblée parlementaire de l’OTAN, il a indiqué qu’Astana avait l’intention d’apporter un soutien accru aux opérations de maintien de la paix en Afghanistan en y envoyant des soldats.
Ces unités pourraient inclure des combattants issus du KAZBAT, le bataillon kazakh de maintien de la paix, qui travailleraient dans les hôpitaux militaires et au quartier général de l’ISAF à Kaboul. Saoudabaev a annoncé que le renforcement de liens de coopération constructifs et mutuellement profitables avec l’OTAN était une priorité de la politique étrangère kazakhe. Le 2 décembre, Astana donnait une nouvelle preuve de ses intentions en acceptant d’ouvrir la base ­militaire de l’aéroport d’Almaty aux atterrissages d’urgence d’appareils américains et de l’Alliance dans le cadre de leurs opérations en Afghanistan. D’après des sources proches du ministère de la Défense kazakh, Washington et Londres font de plus en plus pression depuis quelques mois afin que le Kazakhstan envoie des troupes en Afghanistan pour épauler la mission de l’ISAF, bien qu’Astana ait rechigné à mettre en œuvre une telle réorientation politique.
Intérieurement, le déploiement suscite une forte opposition, non seulement de la part des pacifistes au Parlement, mais aussi d’anciens combattants de la guerre soviéto-afghane. Prenant en compte ces considérations, le président Noursoultan Nazarbaev s’est donc efforcé de parvenir à une solution intermédiaire, qui offrirait les avantages de la mission très médiatisée du KAZBAT en Irak sans pour autant autoriser le déploiement opérationnel des soldats kazakhs. Autrement dit, en envoyant le KAZBAT en Afghanistan se charger de missions médicales, ou des officiers à l’état-major de l’ISAF, le régime risque moins d’être critiqué si ces unités venaient à essuyer des pertes. Cette question est très sensible pour le gouvernement, particulièrement depuis janvier 2005. A l’époque, un capitaine du KAZBAT avait trouvé la mort en Irak pendant qu’il déchargeait des munitions d’un véhicule. D’ailleurs, depuis que les membres du KAZBAT portent les uniformes standard de l’OTAN, les Kazakhs se demandent s’il n’y a pas plus de risques qu’ils soient pris pour des combattants américains ou alliés et qu’ils se fassent tuer. Nazarbaev a donc pris soin d’utiliser la carte du maintien de la paix afin de donner une bonne image de l’armée kazakhe à l’étranger, de montrer son implication dans la “guerre contre la terreur” et de renforcer sa politique étrangère, axée sur les approches plurielles. Le Kazakhstan rêve de devenir le premier pays d’Asie centrale à disposer de forces de maintien de la paix capables d’agir en interopérabilité avec l’OTAN. Ayant obtenu un soutien important des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et de l’OTAN pour renforcer, entraîner, équiper et même gonfler les rangs de son bataillon afin d’en faire une brigade (KAZBRIG) prête à jouer un rôle actif dans les opérations de maintien de la paix sous la férule de l’Alliance, le Kazakhstan tient à ce que son interopérabilité avec l’OTAN soit reconnue. Lors de manœuvres militaires conjointes avec les Américains et les Britanniques, une équipe de l’OTAN a effectué une évaluation du KAZBAT. Le ministre de la Défense kazakh, Daniyal Akhmetov, aurait été satisfait du résultat et les autorités d’Astana pensent que le statut d’interopérabilité sera accordé.

Selon un rapport de la Fondation Jamestown [un think tank basé à Washington], “les observateurs citent au moins trois raisons pour expliquer l’importance stratégique croissante du Kazakh­stan sur l’échiquier mondial”. “Tout d’abord, [le président élu Barack] Obama s’étant engagé à augmenter les effectifs du contingent américain en Afghanistan en les faisant passer à 20 000 hommes, les forces américaines ­ ne pourront plus compter uniquement sur l’aéroport de Manas, au Kirghizistan. Ensuite, en accroissant leur présence militaire en Asie centrale, les forces des Etats-Unis et de l’OTAN sont décidées à exclure la Russie et la Chine de cette région riche en pétrole et vitale sur le plan stratégique. Cette stratégie correspond également au projet de création, soutenu par Washington, d’une Grande Asie centrale allant de l’Afghanistan au Moyen-Orient, en passant par les Etats d’Asie centrale. Enfin, en accédant à une base aérienne au Kazakhstan, les Etats-Unis pourront surveiller et collecter des renseignements sur les ­installations nucléaires chinoises.”

Moscou s’est lancé dans des manœuvres parallèles
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Pourtant, en dépit de l’importance accordée par le régime à ces signes de légitimité et de reconnaissance internationale, Nazarbaev et le cercle de ses proches ont fait l’objet de pressions marquées de la part de la Russie, après les cinq jours de guerre entre Moscou et Tbilissi, en août dernier. En fait, tandis qu’Astana attend la décision de l’OTAN et se prépare à envoyer des soldats en Afghanistan, le Kremlin poursuit le développement de son propre projet de forces de maintien de la paix au sein de l’Organisation du traité de sécurité collective [l’OTSC réunit sept pays de l’ex-URSS : l’Arménie, la Biélorussie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, la Russie, le ­Tadji­kistan et l’Ouzbékistan]. L’OTSC devrait disposer d’unités opérationnelles en 2010, quand le Kazakhstan prendra la présidence de l’Organi­­sation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Moscou suit l’implication croissante du Kazakhstan dans le domaine du maintien de la paix internationale et s’efforce d’englober les mêmes forces que celles qui intéressent l’Occident dans ses initiatives bilatérales et multilatérales. La Russie puise, entre autres, dans les forces aériennes mobiles du Kazakhstan, basées à Kapchagaï. Si Nazarbaev s’efforce de miser sur les deux tableaux, ce qui lui a jusqu’à présent toujours réussi, il lui faut savoir si Moscou s’opposera à une participation limitée de son pays dans les opérations de l’ISAF. Ce qu’il veut éviter à tout prix, c’est de céder aux pressions occidentales en faveur d’un déploiement “opérationnel” en Afghanistan, ce qui autoriserait une compagnie du KAZBAT à patrouiller et à effectuer des missions de maintien de la paix plus dangereuses. Il a su tirer les leçons du déploiement du bataillon en Irak. En acceptant qu’un élément modeste de ses forces de maintien de la paix soit utilisé dans des missions de soutien, il minimise les risques, tout en empochant des dividendes importants.

Roger N. McDermott Asia Times Online
Courrier International