Vous êtes à la recherche de personnels pour des postes au Kazakhstan?

Eurokaz peut vous aider en publiant votre annonce sur le site de son portail
Eurokaz News, section "
Offre d'emploi"

mardi 14 juin 2011

Au Kazakhstan, bras de fer autour du plus gros projet pétrolier au monde

Le développement de l'énorme gisement de Kashagan suscite des tensions entre les autorités kazakhes et les grandes compagnies pétrolières de la planète. La première partie du projet affiche sept ans de retard. La seconde n'a plus de calendrier.

Il s'agit du plus grand projet jamais mis en œuvre par des compagnies pétrolières. Mais c'est aussi un immense gâchis et un sujet de tension croissante entre l'État kazakh et les plus grands pétroliers de la planète. Depuis dix ans, ExxonMobil, ENI, Total, Shell, ConocoPhilips et le japonais Inpex ont investi plusieurs dizaines de milliards de dollars dans le développement de l'énorme gisement de Kashagan. Mais certaines compagnies commencent à se lasser. Les indiens ONGC et GAIL ont annoncé la semaine dernière qu'elles avaient engagé des discussions avec ExxonMobil pour reprendre une partie de ses 16,8 %. Si le numéro un américain est prêt à lâcher du lest alors que les majors peinent à accéder aux ressources des pays producteurs, c'est que le dossier Kashagan est vraiment mal parti...

Situé en mer Caspienne, ce champ de 3.000 km 2 constitue la plus grande découverte de pétrole des trente dernières années. Il contient quelque 35 milliards de barils de réserves en place et doit permettre d'atteindre une production de 1,5 million de barils par jour à l'issue d'une montée en puissance en trois étapes. Mais depuis son lancement, le projet n'a cessé d'accumuler les dérapages du fait de sa taille et de sa complexité (présence de gaz toxiques, forte pression). Aujourd'hui, plus personne ne se risque à avancer un calendrier ou un budget pour l'ensemble du projet.

Seule certitude : compte tenu de l'avancée des travaux, la première goutte de pétrole sera produite fin 2012 ou début 2013. C'est-à-dire avec un retard de sept à huit ans sur le calendrier initial. Entre-temps, les coûts ont explosé. Le budget de Kashagan est passé de 57 milliards à 136 milliards de dollars. Mais cette dernière estimation, qui date de 2007, n'a plus beaucoup de sens. Evalué à 38 milliards de dollars, le budget de la première phase « va être actualisée prochainement », explique un membre du consortium. « Il sera revu à la hausse », confirme un autre.

Inquiet, le gouvernement kazakh laisse planer le doute sur le passage à la deuxième étape du projet, qui doit permettre de doubler la production pour atteindre environ 1 million de barils par jour. Astana n'est pas satisfait des solutions techniques présentées par le consortium, jugées trop coûteuses.

En face, les membres du consortium préfèrent produire le plus vite possible, même si les coûts montent. Le contrat signé avec l'État kazakh prévoit en effet le remboursement intégral des frais de développement. Ce n'est qu'ensuite que les pétroliers payeront les royalties sur les barils extraits. Une situation qui ne fait pas l'affaire d'Astana. Bien décidées à imposer une solution moins onéreuse, les autorités kazakhes ont menacé de reporter la phase 2 de deux à trois ans. Ce qui gêne des compagnies pétrolières dont le contrat expire en 2041. Les deux parties cherchent donc un terrain d'entente. Un découpage de la phase 2 en plusieurs portions serait à l'étude. Mais les pétroliers ne croient pas à une issue rapide. Fatigué d'attendre le feu vert du gouvernement, Shell a dissous ses équipes sur place fin mai.

« Trop d'intervenants »

Fin 2008, toutes les parties prenantes avaient déjà tenté de remettre le projet sur les rails. Après des mois de négociations, ENI avait perdu le développement de la seconde phase, Shell avait pris en charge la conception des installations off-shore, ExxonMobil le forage et Total la direction de la société conjointe en charge du développement et de l'exploitation. Mais cette organisation assez originale ne semble pas avoir donné les résultats attendus. « Il y a trop d'intervenants », soupire un expert.

Après avoir suscité de grands espoirs lors de sa découverte en 2000, Kashagan provoque désormais une certaine gêne dans la profession. « C'est un sujet de déception et de frustration », explique un observateur. « Il est d'ailleurs étonnant que la communauté financière ne réagisse pas plus alors que les parties prenantes investissent beaucoup d'argent sans avoir une grande visibilité sur les risques et la maîtrise des coûts », ajoute un autre. En lançant l'un des plus gros projets industriels de l'histoire, le secteur semble avoir touché ses limites en termes de maîtrise technique et de management. Et avoir reçu une leçon de modestie.

Emmanuel Grasland pour www.lesechos.fr le 14 juin 2011

0 Comments: