Le directeur général de l'OMC Pascal Lamy ne voit pas de "signe positif" concernant le commerce mondial, durement frappé par la crise, et a fait part de sa "grande perplexité" face à la volonté de la Russie d'adhérer à l'Organisation aux côtés du Bélarus et du Kazakhstan.
"La situation du commerce mondial a empiré. Et si je ne partage pas l'optimisme, parfois un peu de commande, des gouvernements ou de ceux qui cherchent à influencer les marchés financiers, c'est parce que (...) du côté du commerce international, je ne vois pas à l'heure actuelle de signe positif", a déclaré M. Lamy. L'OMC s'attend toujours cette année à une chute du commerce mondial de -9% "sans précédent" depuis la Deuxième Guerre mondiale, a-t-il rappelé lors d'un débat organisé vendredi par l'Association des journalistes économiques et financiers (Ajef) vendredi à Paris.
"Il n'y a rien qui démente qu'on soit toujours en plein dans cette crise qui commence et qui continuera", a-t-il ajouté, estimant que les conséquences sociales de la crise étaient encore "devant nous", notamment dans les pays en voie de développement. Ces pays "n'ont pas de système d'amortisseur social et prennent cette crise de plein fouet", a relevé le dirigeant de l'Organisation mondiale du commerce, récemment reconduit à son poste.
Pour sortir de la crise, M. Lamy a appelé notamment à "nettoyer et réguler" le système financier et à lutter contre les "pulsions protectionnistes", même s'il a jugé, sur ce dernier point, qu'il n'y avait pour l'heure pas de "dommages graves", en dépit de dérapages "ici ou là". Il a également réaffirmé son souhait que les négociations de Doha, qui doivent lever des milliers de droits de douanes et réduire les subventions à l'agriculture dans les pays riches, puissent être conclues "en 2010". "Nous sommes à 80% du chemin", a-t-il estimé.
Pascal Lamy a par ailleurs fait part de sa "grande perplexité" devant la volonté de la Russie d'adhérer à l'OMC collectivement aux côtés du Bélarus et du Kazakhstan, et non plus seule. Mardi, le Premier ministre russe Vladimir Poutine a annoncé que la Russie, le Bélarus et le Kazakhstan allaient parachever leur union douanière et présenter une candidature collective à l'OMC, mettant ainsi un terme au processus d'adhésion individuelle des trois pays.
"Du point de vue des procédures, il n'y a pas de précédent de l'adhésion d'une union douanière" à l'OMC, a affirmé M. Lamy, ajoutant que son organisation n'avait pour l'heure reçu aucune demande officielle. "Peuvent accéder à l'OMC des entités qui ont une politique commerciale autonome (...). Est-ce qu'une union douanière est un ensemble souverain en matière commerciale, ça mérite discussion", s'est-il interrogé, relevant "au moins vingt problèmes" de procédure posés par cette candidature. "On va voir quelle est la réaction des membres de l'OMC qui ont négocié (...) l'adhésion de la Russie. S'il faut repartir de zéro, on va voir", a-t-il commenté.
Lancé il y a quinze ans, le tortueux processus d'adhésion de la Russie avait été remis en cause à la fois par Moscou et par les Etats-Unis en août 2008 après l'intervention armée russe en Géorgie.
Créée en 1995, l'OMC compte 153 pays membres.
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