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jeudi 29 octobre 2009

La mer d'Aral en voie de renaissance au Kazakshtan


AKESPE, Kazakhstan — La mer d'Aral est de retour. Réduite à peau de chagrin par de grands systèmes d'irrigation en Asie centrale, elle renaît désormais peu à peu, dans sa portion située au Kazakhstan, grâce à un barrage qui détourne à son profit les eaux du fleuve Syr Daria.

Jadis quatrième plus grande étendue d'eau douce au monde avec une superficie comparable à l'Irlande, la mer d'Aral a vu ses eaux détournées à l'époque soviétique pour irriguer de vastes champs de coton, ce qui l'a fait disparaître à 90%, la réduisant à une série de petites étendues d'eau isolées. Une catastrophe "sans précédent dans les temps modernes", explique Philip Micklin, professeur de géographie à l'université Western Michigan, aux Etats-Unis.

Près de 18 ans après la disparition de l'URSS, la situation reste très préoccupante. Des images satellitaires prises cette année montrent qu'une partie de la mer d'Aral s'est rétrécie de 80% au cours des trois dernières années.

La construction du barrage de Kokaral par la Banque mondiale et le gouvernement kazakh a en revanche permis la renaissance d'une petite section de la mer d'Aral située au Kazakhstan. Le port d'Aralsk, également connu sous le nom d'Aral, avait fini par se retrouver à 100 kilomètres à l'intérieur des terres au Kazakhstan. Mais depuis la construction du barrage, l'eau est revenue à moins de 25 kilomètres de la localité, et pourrait l'atteindre dans six ans, selon la Banque mondiale. "Bonne nouvelle: la mer revient", annonce un panneau à l'entrée d'Aralsk.

"Il y a enfin de l'espoir et une vie à mener ici", déclare Badarkhan Prikeïev, 49 ans, un négociant en poissons en attendant ses pêcheurs près du village d'Akespe, à 90 kilomètres à l'ouest d'Aralsk. "Il y a du travail pour ceux qui le veulent." Cet été, ses bateaux sont revenus chargés de brochets et de carpes.

Un programme de 88 millions de dollars lancé en 2001 a abouti à la construction du barrage de Kokaral pour diriger les eaux du Syr Darya vers la partie kazakhe de la mer d'Aral plutôt que de les laisser "se perdre" en s'écoulant vers le sud.

Les cinq anciennes Républiques soviétiques d'Asie centrale sont largement d'accord sur la nécessité de coordonner l'utilisation des deux grands fleuves de la région: l'Amou Darya et le Syr Darya. Mais en pratique, il y a peu de collaboration, ce qui signifie une mort certaine pour une grande partie de la mer d'Aral.

L'impact du barrage de Kokaral est en tout cas spectaculaire. La hausse du niveau de l'eau a rafraîchi le climat et réduit suffisamment la salinité de la mer d'Aral dans cette zone pour permettre la vie d'espèces d'eau douce.

Selon la Banque mondiale, les prises de poissons d'eau douce ont atteint 2.000 tonnes en 2007 contre seulement 52 tonnes en 2004. Pour la première fois depuis des années, de nombreux Kazakhs vivant près du rivage ont le sentiment d'avoir un avenir.

"Mon père a grandi dans un village de pêcheurs et prendre du poisson est ce que nous avons fait toute notre vie", explique M. Prikeïev, qui supervise plus de 100 pêcheurs lorsque la saison bat son plein, en été. "Mon rêve est d'améliorer les choses pour les pêcheurs, pour qu'ils puissent vivre et travailler un peu plus facilement."

Alexander Dantchenko, ouvrier de chantier naval en retraite, assure que le retour de l'eau a un impact sur le climat. "Lorsqu'il n'y avait pas la mer, on avait l'impression d'être dans une poêle à frire au milieu du désert ici." Mais avec le retour de l'eau "on peut sentir parfois une brise fraîche et agréable venir du sud".

Les progrès enregistrés au Kazakhstan restent toutefois modestes comparés à l'ampleur du désastre. Plutôt que de chercher à sauver la mer d'Aral, l'Ouzbékistan, qui en contrôle les trois-quarts, a choisi de maintenir la lucrative industrie du coton et de rechercher du gaz et du pétrole sous son lit asséché.


The Canadian Press. De Peter Leonard

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